
Crise en RDC: Le parlement européen adopte une résolution suspendant la coopération minière avec le Rwanda
Par Jean Claude Kantore
Alors que les rebelles du M23 continue sa progression vers Bukavu après la prise de Goma la capitale du Nord Kivu, le Parlement européen a adopté une résolution historique sur sa coopération minière avec le Rwanda, accusé de soutenir ce mouvement.
Cette résolution dénonce l’occupation de plusieurs territoires congolais par ce groupe rebelle selon divers rapports sur la crise dans cette partie est de la RDC. Le 13 février, les députés ont appelé à la suspension immédiate de la coopération minière entre l’Union européenne (UE) et le Rwanda.
Une décision qui pourrait avoir des conséquences majeures sur le commerce des matières premières critiques en Europe selon plusieurs analystes.
- Un secteur clé en danger pour le Rwanda
Le secteur minier est un pilier essentiel de l’économie rwandaise alors que son sous est vide. Il représentait 1,1 milliard de dollars de recettes en 2023, soit une augmentation de 43 % par rapport à l’année précédente. Parmi les minerais les plus exportés figurent la cassitérite, le coltan, le wolfram et l’or. Ces ressources sont essentielles pour l’industrie technologique mondiale, notamment dans la fabrication des smartphones et des équipements électroniques.
Selon les statistiques du quatrième trimestre 2023, le Rwanda a exporté plusieurs milliers de tonnes de minerais.
Ces statistiques sont détaillées commensuit par le journal congolais Mines cd qui focalise sur l’extraction des mines en RDC.
Cassitérite : 1 293 608 kg
Coltan : 468 577 kg
Wolfram : 640 987 kg
Or : 3 158 kg
Lors du débat précédant l’adoption de la résolution, Charles Goerens, député européen du groupe Renew Europe, a déclaré : « Nous ne pouvons continuer à fermer les yeux sur l’origine douteuse des minerais qui alimentent notre économie numérique. Suspendre la coopération avec le Rwanda est un acte nécessaire pour garantir que nos valeurs ne soient pas compromises. »
De son côté, Jutta Urpilainen, Commissaire européenne aux Partenariats internationaux, a rappelé dans une interview donnée à Euractiv le 10 février 2025 : « L’Europe doit s’assurer que ses chaînes d’approvisionnement sont exemptes de tout lien avec les conflits. Notre priorité est de renforcer la traçabilité des minerais et d’encourager les bonnes pratiques en Afrique. »
En réaction à cette résolution, Vincent Karega, ambassadeur du Rwanda auprès de l’UE, a vivement réagi le 14 février 2025 depuis Bruxelles : « Cette décision est injuste et mal informée. Elle risque de nuire aux efforts de développement de notre pays, sans pour autant améliorer la situation sécuritaire en RDC. »
- L’impact des matières premières sur le marché européen
La suspension de la coopération minière entre l’UE et le Rwanda pourrait bouleverser l’approvisionnement en coltan et d’autres minerais essentiels comme l’étain, le tungstène, la tantale,l’or, etc. pour l’industrie technologique européenne. Pierre Olivier François, analyste en ressources stratégiques au Centre d’études africaines de Paris, a averti lors d’un colloque à l’Université de la Sorbonne, le 12 février 2025 : « L’Europe devra trouver rapidement des alternatives pour sécuriser son approvisionnement en coltan, faute de quoi nous pourrions assister à une hausse des prix et à une dépendance accrue envers l’Asie. »
Quant aux organisations de défense des droits humains, cette décision du Parlement européen est à saluer.
Anneke Van Woudenberg, directrice exécutive de l’ONG Rights and Accountability in Development (RAID), a déclaré lors d’une conférence de presse à Londres que : « Cette résolution est une victoire pour les populations de la RDC. Elle envoie un message clair : l’exploitation illégale des ressources naturelles ne sera plus tolérée. »
Le Parlement européen a également encouragé la mise en place de normes plus strictes pour garantir la traçabilité des minerais et éviter que l’Europe ne soit complice de conflits armés.
Cette résolution marque un tournant dans les relations entre l’UE et le Rwanda, mettant en lumière l’importance d’une chaîne d’approvisionnement responsable. Elle montre également que la communauté internationale prend de plus en plus au sérieux les liens entre ressources naturelles et conflits armés.